IFRS 16-MAÎTRISER LES PRINCIPAUX CHANGEMENTS LIÉS À LA COMPTABILISATION DES CONTRATS DE LOCATION
ARTICLE FAIT PAR : Mr Haykal Kchaw (tunisianifrsgroup.wordpress.com)
• Projet IFRS 16 : Pourquoi ?
Le projet est mené par l’IASB conjointement avec le FASB américain et a pour objectif de simplifier la présentation des contrats de location dans les comptes du preneur. Selon l’IAS 17, ce dernier est obligé de faire la distinction entre un contrat de location financement (Présentation à l’actif du bien en location en contrepartie d’un compte de dette financière) et location simple (comptabilisation d’une charge locative).
L’IFRS 16 traite tous les contrats de location de la même façon. Si un contrat contient une composante location cette dernière est considère comme un droit d’utilisation à comptabiliser en actif au niveau bilan sans être obligé de faire la distinction entre location simple et location-financement.
La nouvelle norme ne change pas l’approche pour la comptabilisation chez le bailleur et reste conforme à l’ancienne norme.
A notre avis, cette norme vient renforcer le principe IFRS qui consiste à comptabiliser un droit d’utilisation en actif et à l’amortir sur une durée d’utilité. ça nous rappelle le principe de l’interprétation IFRIC 12 « Contrats de concession » intégrée dans le champ d’application de l’IFRS 15 qui stipule la comptabilisation d’un droit d’utilisation si par exemple une société bénéfice d’un droit d’exploitation d’un aéroport ou une autoroute dans le cadre d’un contrat de concession.
Le deuxième fondement repose sur le fait qu’en pratique des contrats de location qualifiés de simple sont à long terme et empêche le preneur de comptabiliser son droit à l’actif. L’IFRS 16 vient remédier à ce problème (¹).
• Date d’application et démarche
Date d’entrée en vigueur
L’entité doit appliquer la présente norme pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2019. Une application anticipée est permise pour les entités qui, à la date de première application de la présente norme, appliquent déjà IFRS 15 Produits des activités ordinaires tirés de contrats conclus avec des clients ou commencent à l’appliquer. Si l’entité applique la présente norme de manière anticipée, elle doit l’indiquer.
Dispositions transitoires et mesures de simplification
• Les contrats identifiés comme des contrats de location financement selon IAS 17 & IFRIC 4 seront systématiquement qualifiés, de contrat de location selon IFRS 16 ;
La définition d’IFRS 16 ne s’appliquera qu’aux contrats conclus après la date de 1ère application
- Les contrats non identifiés comme des contrats de location-financement selon IAS 17 & IFRIC 4, préalablement à la date de 1ère application, ne seront pas réexaminés.
- Ne pas retraiter selon IFRS 16 les exercices comparatifs et comptabiliser les effets cumulés du changement de méthode à l’ouverture de l’exercice de première application (1/1/2019 : Application rétrospective simplifiée)
- Retraiter la période comparative 2018 conformément à l’IFRS 16 (application rétrospective complète -IAS 8)
• Normes et interprétations remplacées par l’IFRS 16
La présente norme annule et remplace les normes et interprétations suivantes :
(a) IAS 17 Contrats de location ;
(b) IFRIC 4 Déterminer si un accord contient un contrat de location ;
(c) SIC-15 Avantages dans les contrats de location simple ;
(d) SIC-27 Évaluation de la substance des transactions prenant la forme juridique d’un contrat de location.
• Principes généraux de comptabilisation chez le preneur
L’IASB et le FASB ont opté pour un modèle unique de comptabilisation des contrats de location chez le preneur.
À la date de passation d’un contrat, l’entité doit apprécier si celui-ci est ou contient un contrat de location.
Un contrat est ou contient un contrat de location s’il confère le droit de contrôler l’utilisation d’un bien déterminé pour un certain temps moyennant une contrepartie.
À la date de début, le preneur doit évaluer l’actif au titre du droit d’utilisation au coût.
À la date de début, le preneur doit évaluer l’obligation locative (passif) à la valeur actualisée des paiements de loyers qui n’ont pas encore été versés. La valeur actualisée des paiements de loyers (²) doit être calculée à l’aide du taux d’intérêt implicite du contrat de location s’il est possible de déterminer facilement ce taux. Sinon, le preneur doit utiliser son taux d’emprunt marginal.
Ultérieurement, le preneur doit évaluer l’actif au titre du droit d’utilisation en appliquant le modèle du coût (amortissement sur la durée d’utilité), à moins qu’il n’applique l’un ou l’autre des modèles d’évaluation (réévaluation selon IAS 16 ou IAS 40)
Exceptions:
Le preneur peut choisir de ne pas appliquer ces dispositions pour :
(a) les contrats de location à court terme ;
(b) les contrats de location dont le bien sous-jacent est de faible valeur.
• Principes généraux de comptabilisation chez le bailleur
Pour simplifier, le bailleur applique la démarche IAS 17. Cela étant, il doit distinguer les contrats de location simple ( comptabiliser l’actif au bilan et les revenus locatifs dans son ERG) des contrats de location-financement ( comptabiliser dans l’état de la situation financière la créance en vertu d’un contrat de location-financement pour un montant égal à l’investissement net dans le contrat de location.
• Impacts sur les indicateurs financiers
Exemple simplifié
-Un contrat de location d’un entrepôt pour un loyer annuel e 50 000 UM
– Taux d’actualisation : 10%
– Durée de bail : 3 ans
-Aucun option d’achat
Selon l’IFRS 16, un droit d’utilisation doit être comptabilisé en contrepartie d’une dette financière au montant actualisé 124 342,6 UM 〈 50 000/ (1+10%)〉 + 〈 50 000/ (1+10%)²〉 + 〈 50 000/ (1+10%)³〉
Supposons qu’en application des critères de classement de l’IAS 17, le preneur conclut que le contrat est un contrat de location simple, aucune écriture n’est comptabilisée au début de la période.
Période 1 | Période 2 | Période 3 | Total | |
Annuité | 50 000 | 50 000 | 50 000 | 150 000 |
Montant actualisé | 45 454,5 | 41 322,3 | 37 565,7 | 124 342,6 |
Remboursement principal | 37 565,7 | 41 322,3 | 45 454,5 | 124342,6 |
Remboursement intérêt | 12 434,2 | 8 677,69 | 4 545,4 | 25 657,4 |
Capital restant de la dette | 86 776,8 | 45 454,5 | – |
A la fin de la période,
Etat de résultat global | IAS 17 | IFRS 16 |
Charge locative | 50 000 | – |
Charge d’intérêt | – | 12 434 |
Dotation aux amortissement (124342/3) | – | 41 448 |
Total charge | 50 000 | 53 882 |
A la fin de la période selon IFRS 16, le paiement annuel de 50 000 est défalqué en principal (37 565,7) et intérêts ( 12 434).
· Aucun impact sur l’état de flux de trésorerie, les mêmes sommes sont décaissée selon les deux normes.
• Enjeux futurs
La norme IFRS 16 repose sur l’identification de la composante location ceci passe par un recensement des contrats et par une séparation des composants pour les traiter différemment (par exemple un contrat location d’un espace de restauration avec une composante service des repas).
• Impacts filiales tunisiennes des groupes internationaux appliquant le référentiel IFRS
La Norme comptable tunisienne reste largement inspirée de l’ancienne norme IAS 17. En absence d’obligation légale d’application des normes IFRS en Tunisie, la seule obligation est liée au reporting interne (Liasse IFRS) des sociétés tunisiennes à leurs sociétés mères à l’étranger qui consolident en IFRS. ces filiales doivent suivre les choix comptables du groupe notamment pour les dispositions transitoires et auront l’ensemble de leurs contrats de locations simples (preneur) retraités sauf dans le cas d’exception (montant et période).
(¹) Pragaraphe 19 de l’IAS 17 « Selon IAS 40, il est possible pour un preneur de classer un droit sur un bien immobilier détenu dans le cadre d’un contrat de location simple comme immeuble de placement. Si tel est le cas, ce droit sur un bien immobilier
est comptabilisé comme s’il s’agissait d’un contrat de location-financement »
(²) La valeur actualisée des paiements des loyers contient :
(a) les paiements fixes, déduction faite des avantages incitatifs à la location à recevoir ;
(b) les paiements de loyers variables qui sont fonction d’un indice ou d’un taux , initialement évalués au moyen de l’indice ou du taux en vigueur à la date de début ;
(c) les sommes que le preneur s’attend à devoir payer au bailleur au titre de garanties de valeur résiduelle ;
(d) le prix d’exercice de l’option d’achat que le preneur a la certitude raisonnable d’exercer ;
(e) les pénalités exigées en cas de résiliation du contrat de location, si la durée du contrat de location reflète l’exercice par le preneur de l’option de résiliation du contrat de location.
Texte de norme
https://tunisianifrsgroup.files.wordpress.com/2017/08/ifrs16.pdf